Après 2 mois de voyage et pour approfondir quelques commentaires …
Bien sûr, nous avons des contacts avec la population locale, et plusieurs fois par jour … Des contacts très sympathiques. En Indonésie, les gens sont très souriants, très courtois, toujours prêts à nous offrir leurs services. Sérieusement, les relations sont tout à fait agréables mais c’est un échange chargé d’un préambule inévitable : ils sont pauvres, nous sommes riches. Impossible de l’oublier et impossible aussi de passer inaperçu. Même à pied, sans sac, sans appareil photo, avec un vieux tee-shirt uni, je suis toujours surpris par la vitesse avec laquelle on me propose un taxi ou d’acheter quelques chose. Il y a marqué « quechua » sur mes chaussures, on me prend peut-être pour un Bolivien et non pour un Indonésien.
Depuis le départ du voyage, tout est histoire de couleur de peau, et donc d’argent …
Comme on ne parle ni le zoulou, ni le bahasa indonesia, on ne peut pas tricher. Nous sommes bien des touristes :
– en Namibie des femmes himbas rencontrées sur un marché de Windhoek en tenue traditionnelle, c’est-à-dire presque nues (les Himbas est la tribu dans laquelle va Muriel Robin dans « RDV en Terre Inconnue ») acceptaient d’être photographiées uniquement contre de l’argent.
– j’ai reconnu le mot « touriste » dans le langage des enfants Sasak, moyen infaillible de faire sortir les parents des maisons pour proposer leurs sarongs, écharpes et autres articles artisanaux …
– A Kuta-Lombok, un petit gars bien marrant de 11 ans au discours parfaitement rodé (il se fait appeler Kelly Slatter, comme le champion de surf) insiste à plusieurs reprises pour me vendre ses bracelets en les montrant bien aux filles ; comme je refuse à chaque fois , il me fait un chantage affectif en disant que mes filles vont être en colère contre moi … D’ailleurs, la vie de ce gars est parfaite pour illustrer d’un cas pratique la séance 1-5 d’Education Civique faite avec Cléo quelques jours auparavant et qui s’intitule « tous les enfants du monde ne vont pas à l’école ».
Bref nous sommes avant tout des clients, comme quand des Allemands partent 15 jours aux Baléares. Mais comme nous avons bien plus de temps, il y a quand même des échanges plus profonds :
– Sur une plage de Lombok, Isa a bien discuté avec des vendeuses de fruits, dont une jeune de 19 ans est bientôt maman : non l’école c’est trop cher, oui, elles choisissent leur mari (mais il ne faut pas trop tarder), oui, l’accouchement se fait avec les femmes du village car le médecin, c’est trop cher et trop loin.
– Lors de notre semaine à Ubud, nous avons passé une journée avec notre guide Wayan, et avons pu lui poser des questions sur sa vie : à Bali par exemple, il parait inimaginable même une fois adulte et marié, de quitter ses parents. Il vit donc toujours avec ses parents âgés et malades dont il a désormais la charge, en plus de sa femme et de sa fille.
– Durant l’épisode du 4×4 dans l’eau au Botswana, j’ai eu 2 jours pour parler avec les Rangers et leur boulot. Ils se disent passionnés et on voit qu’ils ont la patience de vivre l’inertie de leur employeur, l’organisme public de gestion des parcs et réserves. S’il a fallu tout ce temps pour sortir la voiture de l’eau c’est parce que le conducteur de l’engin de chantier voulait travailler après sa journée, à la nuit tombée, pour être payer en heures supplémentaires …
– Pendant ce temps là, Isa et les filles étaient hébergées chez Néo, jeune botswanienne, qui vit à la bougie, qui doit se méfier en sortant de chez elle le soir car les hyènes l’attendent derrière la porte, et qui n’est même jamais allée dans la capitale Gaborone. Alors quand on lui explique notre voyage, elle est un peu sceptique… Isa a promis de lui écrire pour lui donner des nouvelles des filles … à suivre.
– Aujourd’hui dans un trajet de bus de 2 heures, j’ai bien discuté avec Gafar, 22 ans qui joue dans de la guitare dans des clubs le soir et dans les bus publics la journée. Il m’a dit que son père était malade et que ça serait bien que je lui donne un peu d’argent ; il nous a aussi aidé lors d’une correspondance de transport.
Les Indonésiens ont la plaisanterie facile. Lors d’une négo pour louer une voiture, un gars dit à haute voix en pleine rue : « Monsieur veut louer un hélicoptère pour le prix d’un scooter, qui veut faire l’affaire ? ». Un chinois nous vend un billet de Ferry ; une fois d’accord sur le prix, il inscrit sur le bon un prix supérieur en me disant «chut, je n’ai jamais fait ce prix avant, il ne faut pas que ça se sache…» (à d’autres …). L’Indonésie autrefois, c’était le carrefour des échanges commerciaux indiens, chinois, arabes, portugais et hollandais. Ca fait longtemps qu’ils discutent les prix. Ici, il faut tout le temps marchander et sur tout. Les prix annoncés sont peut-être 5 ou 10 fois supérieurs à ceux pratiqués pour les locaux. Nous sommes contents quand nous obtenons 30% de rabais. On a même obtenu un prix de fidélité en revenant dans un resto pour 3 repas de suite … J’aime bien ces négociations.
Pour des rencontres plutôt que des contacts, nous avons quelques possibilités :
– « Bouger moins» pour plus « voyager plus »
– Sortir (un peu) des sentiers battus
– Aller dormir chez l’habitant
On essayera sûrement la 3ème option.
Ne soyons pas dupe de l’authenticité des échanges : la modernité est partout ou presque, l’argent est le moteur du monde ; quand une tribu semble authentique, c’est souvent une part de mise en scène pour plaire aux voyageurs : Sylvie Brunel explique dans « la Planète disneylandisée », qu’après avoir exécuté une danse traditionnelle, les Polynésiens quittent leurs jupes d’herbes pour enfiler une paire de Nike !
Mais attention, je ne suis pas déçu pour autant. Au contraire.
Pour ce qui est des contacts entre les filles et les enfants locaux … Il n’y en a quasiment pas : en cause, la barrière de la langue et le tempérament probablement. Ca changera peut-être plus tard. Un truc qui nous a surpris au début, il est arrivé 2 ou 3 fois que des locaux prennent les filles en photo avec leurs téléphones portables.
Fred
PS : on leur demande souvent de rédiger à nouveau article. En vain pour l’instant. D’après Cléo « y a rien à dire depuis la galère » (l’épisode du 4×4 bloqué dans l’eau). Lena lit attentivement le blog. Cléo et Mady aiment beaucoup qu’on leur lise vos commentaires.